#4 « J’ai mangé une pizza à la viande de renne, c’était pas mal. »

L’odyssée d’Olivier : 2000 km, le bilan du premier mois

Olivier est parti le 26 juin pour son périple de 7000 km sur l’itinéraire EuroVelo n°7, du cap Nord en Norvège, à Malte. L’avertY vous propose cette interview mensuelle, réalisée le 26 juillet (publiée en léger différé pour des raisons d’agenda). En un mois et 2000 km, que faut-il retenir de ce long voyage à vélo ? Voici quelques réponses, agrémentées des photos d’Olivier.

Épisodes précédents…
#0 (Re)-lire l’interview d’Olivier au départ fictif à Grenoble
#1 Passer le cap
#2 Fuir les moustiques
#3 Mer fraîche, feux de forêts

Le matériel complet d’Olivier.

Depuis un mois, qu’est-ce que tu n’as pas pu faire et qui te manque par rapport au quotidien à Grenoble, au moins un peu ?

Ce que je trouve le plus compliqué sur le voyage, c’est la gestion de la nourriture. Je suis obligé de faire des courses tous les jours. D’une part, je n’ai pas beaucoup de places dans mes bagages. Et d’autre part, je ne peux pas conserver des choses au frais. Je suis obligé d’acheter des petites quantités au jour le jour, et des choses simples à transporter et à cuisiner. J’ai l’impression de manger un peu toujours la même chose. C’est un peu ça qui me manque. C’est la contrainte des voyages à vélo.

Quel est le meilleur repas que tu as mangé depuis le départ ?

J’ai mangé une pizza à la viande de renne, c’était pas mal du tout.

As-tu déjà sauté un repas, et si oui, pourquoi ?

Non. J’ai toujours pris le temps de manger correctement. C’est vachement important pour pouvoir rouler. Avant de partir, je prenais rarement des petits-déjeuners. Là, le matin, je fais l’effort de bien manger pour être en forme pendant la journée.

Couché de soleil capturé lors du voyage en bateau vers le cap Nord.

Quelle soirée, nuit, as-tu le plus apprécié ?

La nuit où j’ai fait le bivouac, parce que ça sortait vraiment de l’ordinaire. C’était les conditions idéales, une très très bonne nuit. À part ça, j’ai fait que des campings, ou des fois, des auberges de jeunesse.

Au contraire, laquelle as-tu détesté, ou moins apprécié ?

Les deux nuits à Luleå. C’était là où j’ai fait ma journée de repos. J’avais décidé d’aller dans une auberge de jeunesse pour être un peu posé, et éventuellement rencontrer des gens. Et en fait, je me suis retrouvé dans une espèce de petit hôtel pas agréable, avec des toutes petites chambres, pas de fenêtre, personne à la réception. Il fallait passer par un code pour Internet. Vraiment pas convivial, pas sympa du tout.

Quel a été le plus gros souci mécanique depuis ton départ ?

Je n’ai quasiment pas eu de soucis. La première semaine, j’avais le garde-boue qui sautait un tout petit peu. Mais non, le vélo va très bien. J’espère que ça va durer le plus longtemps possible. Zéro réparation à faire. Vraiment nickel.

Visite de l’église de Gammelstad.

Quel est le bâtiment que tu as vu qui t’as le plus marqué, intrigué ?

Ce qui m’a le plus marqué, c’est que 95% des bâtiments ici sont de couleur rouge traditionnel, ce qu’on voit sur un certain nombre de mes photos. Je ne pensais pas qu’il y en aurait autant. Partout, partout, partout. Des petites maisons, des granges, des fermes, des petites cabanes dans les bois. Quand je passe d’un village à l’autre, j’ai l’impression que toutes les maisons sont les mêmes. Les mêmes formes, les mêmes organisations. Par contre, quand je vois des églises dans les villages, elles, elles sont très différentes les unes des autres. Ce n’est pas vraiment un style traditionnel ou régional. Je pense à certaines régions en France où toutes les églises sont portées sur le même format. Celle que j’ai visitée de la ville-église est assez jolie. J’ai pris le temps de la visiter, découvrir l’intérieur, des différentes époques où elle a été aménagée. Elle valait le coup d’œil.

Est-ce que ton chargeur solaire marche bien ?

Il marche très bien quand il est exposé au soleil. Le petit souci, c’est que comme je vais principalement vers le Sud, et que je l’ai accroché sur mon porte-bagage, je fais régulièrement de l’ombre dessus. Du coup, il ne recharge pas aussi bien qu’en plein soleil. En général, je le mets au soleil en arrivant le soir au camping, ou je le remets le matin. Donc, il marche bien. Dans les campings, il y a de l’électricité. Je mets mon téléphone sur les prises électriques.

Le chargeur solaire d’Olivier.

C’est quoi le pire niveau météo : vent fort de face ou chaleur à plus de 30 degrés ?

Je crois que je préfère quand même le chaud. J’avance moins vite, mais c’est de belles conditions. Il y a un beau ciel, de belles lumières. Je préfère ça à du vent et de la pluie. Je parle beaucoup de la chaleur, parce que c’est en ce moment, mais je suis relativement content d’avoir eu peu de pluie depuis le début du voyage. Je ne regrette pas le passage au cap Nord, avec le vent bien violent, où j’avais du mal à tenir debout à côté de mon vélo.

En un mot, la Norvège, c’est comment ?

Assez vide. J’ai vu vraiment le Nord de la Norvège, il n’y avait vraiment pas grand monde.

En un mot, la Finlande, c’est comment ?

Je n’y ai passé même pas une journée, ce n’était pas très différent de ce que j’ai vu avant et après. Je ne sais pas comment le dire en un mot, mais la langue est très différente. Ça m’avait marqué.

En trois mots, la Suède, c’est comment ?
C’est grand. Il y a beaucoup d’étendu d’eau. Les routes ne sont pas forcément bien adaptées aux cyclistes.

La côte de la mer Baltique.

Combien as-tu dépensé d’argent depuis le départ (trajet en transport compris), à 50 euros près ?

Pour être honnête, je n’ai pas du tout compté. Si j’essaye de faire un total rapide. Il y a 700 euros de bateau, 250 euros de train pour l’aller. Après, je retire et dépense sans trop regarder. En Suède, j’ai retiré trois fois 200 euros, on va dire 500 euros dépensés. Peut-être 100 euros en Norvège (ndlr : total 1550 euros). Ça doit être un peu près ça.

D’après toi, quel caractère, quel état d’esprit peut-être utile pour accomplir un long voyage comme le tien ?

À mon avis le plus important, c’est d’être vraiment motivé, avoir envie d’aller jusqu’au bout. Il y a plein de moments super, mais il y a aussi des moments difficiles, moins bien. Il faut réussir à passer outre pour aller jusqu’au bout.

Concert au bar du camping.

Quelle rencontre as-tu le plus apprécié depuis ton départ, voyage jusqu’au cap Nord compris ?

C’était dans une petite ville en Suède, il y a quatre, cinq jours. Un Français est venu me voir au supermarché. Il avait vu que j’avais un tee-shirt écrit en français “Grenoble Ekiden”. Il m’a invité à prendre un verre chez lui. J’ai passé une bonne demi-heure à discuter avec Éric, et Sandra, sa femme qui est Suédoise. J’ai passé un bon moment à discuter de la Suède, de leur vie là-bas. C’était le genre de rencontre absolument pas prévue, inattendue, très sympa, qui fait du bien dans un voyage comme ça. J’ai rencontré des cyclistes au cap Nord, ça je m’y attendais. J’ai rencontré John-John par Warmshowers, c’était prévu. Là, c’était vraiment totalement par hasard.

Dans cette épreuve sportive, à quel sportif connu pourrais-tu t’identifier, ou du moins dans quelle discipline ?

Ça va paraître évident, je fais quand même le parallèle avec le Tour de France, parce que je fais des longues étapes tous les jours. À chaque fois dans des paysages différents, avec des distances plus ou moins longues, plus ou moins de dénivelés. Je ne compare pas exactement ce que je fais avec chaque étape du Tour de France. Moi, je le fais avec vélo chargé. Eux, ils sont avec des vélos tous légers, la recherche de la performance. Ce n’est pas tout à fait la même chose. Il y a quand même cette idée de parcourir la distance sur son vélo, et traverser des paysages, tous différents les uns des autres.

Une forêt, une route, un vélo.

Sur ton blog, tu as écrit 31 articles, textes et photos, soit un par jour. Parmi tous ceux-là, lequel as-tu eu le plus de plaisir à écrire ?

Je les oublie aussi vite que je les écris. Quand je suis sur mon vélo, je pense à des petits trucs, je me dis “tiens ça il faudra que je le retienne pour en parler dans le blog ce soir”. J’aime bien quand il s’est passé des choses insolites ou particulières dans la journée. Les jours où j’ai juste l’impression d’avoir roulé à travers la forêt et avalé des kilomètres, j’ai moins de plaisir à l’écrire. Ça dépend aussi des photos. Quand elles sont belles, j’ai plus de plaisir à les partager. Des fois, les photos c’est parce que ça illustre la chose, mais pas forcément de belles photos. Je repense à l’article “Mers et pairs”. Cet article, je me souviens avoir été content quand j’ai trouvé le titre, qui collait bien à ce que je racontais dans l’article. Le titre en lui-même, j’étais content de ma trouvaille.

Combien prends-tu de photo par jour environ ?

Finalement, je n’en prends pas tant que ça. De trois à quinze photos. Il y a des jours où je prends trois photos, que je mets sur le blog. Parce que je ne vois pas forcément des choses qui me paraissent extraordinaires, ou qui méritent de s’arrêter. Des jours c’est un peu plus, quand je fais des journées plus posées. Regarder les animaux, des choses comme ça. La journée de repos, j’en ai fait plus. J’étais en mode touriste. Je pensais que j’en prendrais beaucoup plus.

Comment choisis-tu les photos que tu postes sur ton blog, sur quels critères ?

J’essaye de prendre celles qui sont jolies, représentatives de ce que j’ai pu voir dans la journée. Un paysage, un bâtiment qui ressort, qui illustre.

Sur la route, vers Umeå.

Tu as reçu de nombreux commentaires sur tes articles de blog. Est-ce qu’il y en a qui t’ont particulièrement touché, ou que tu as apprécié ?

De manière générale, les commentaires d’encouragement sur le projet, sur le blog, ça me touche beaucoup. Et puis ça me motive, ça me donne une motivation supplémentaire à continuer. J’aime bien aussi prendre le temps de répondre aux questions qui me sont posées. C’est quelque chose qui me plaît bien d’interagir avec les gens, même s’ils sont loin. Quelque part ça rapproche de faire ces échanges-là.

À part avec L’avertY, avec qui as-tu échangé par téléphone depuis le départ ?

J’ai échangé avec une copine de Chambéry, qui va venir me rejoindre la semaine prochaine. Elle va faire une dizaine de jours à vélo avec moi. Normalement, on doit se retrouver mercredi (1er août). On va rouler tranquillement ensemble. Elle a déjà fait un voyage à vélo en France. C’est l’occasion d’en faire un autre. On sera sur la côte Ouest de Suède, et sûrement un peu au Danemark, peut-être en Allemagne si on roule bien. Je ne sais pas trop encore. On n’a pas de programme très précis. On va profiter de passer des bons moments ensemble. Sinon, j’ai eu mon père sur le trajet en bateau. Il m’a appelé par erreur. La plupart des échanges, c’était sur le blog.

Si tu étais intervieweur, quelle question poserais-tu à L’avertY ?

Inversion des rôles…

Olivier : 
Comment gères-tu le fait de lancer ce projet pour l’instant tout seul, en cherchant du monde, en essayant de lancer une communauté en même temps. Comment arrives-tu à construire ces relations à la fois avec des partenaires et avec des lecteurs de L’avertY ?

Ludovic : 
Pour l’instant, je suis tout seul et j’aimerais bien m’associer avec des personnes pour pouvoir aller plus loin, et faire plus de choses. Ça reste limité quand on est tout seul. J’envisage ma vie professionnelle vraiment à plusieurs, pour avoir des vraies synergies de travail en groupe. Pour ces valeurs-là. Pour la communauté, ça me fait plaisir d’essayer d’animer une petite communauté à Grenoble. J’aime bien entrer en contact avec les gens. Récemment, j’ai rencontré une personne qui a fait une contribution, qui sera publiée pour la rentrée. On a fait une photo. C’était sympa de la rencontrer, c’était au Cabaret frappé. De voir les gens en vrai, c’est encore plus sympa. C’est aussi ce qui est prévu dans mon projet à la base : une fois que les gens ont débattu en ligne, qu’ils puissent aussi se rencontrer en vrai. J’ai cette envie de transcender le web, pour aller vers le terrain. Pour construire tout ça, c’est du travail. Je fais des programmations cet été pour les réseaux sociaux. Même quand je serais en vacances, il y aura quelques petites publications que j’ai automatisées, pour maintenir le lien, et continuer à être visible sur mon projet. L’idée, c’est d’être le plus visible possible. Plus je serais visible, plus j’aurais de facilité à trouver à la fois des partenaires, et pour être crédible aussi. Il y a donc un gros enjeu de communication pour moi.

Franchis ce matin du 26 juillet 2018.

Encouragez Olivier à parcourir les 5000 km restants en envoyant des questions, commentaires, mots sympas à ludovic.chataing@laverty.fr. Rejoignez le salon de discussions Discord. D’autres photos disponibles sur son blog.

Propos recueillis et mise en page par Ludovic Chataing
Photos Olivier Letz.

#3 « On a pas mal de points communs sur lesquels on a pu échanger. »

L’odyssée d’Olivier : mer fraîche, feux de forêts

Ce 20 juillet, Olivier enchaîne les étapes le long de la mer baltique. Il a dépassé la barre symbolique des 1000 km d’Odyssée à vélo. Les températures historiques en Suède occasionnent des feux de forêts à travers le pays, ce qui inquiète un peu Olivier. Pas de quoi le décourager pour autant, il maintient son cap et a même rencontré un Suédois qui l’a hébergé.

#0 (Re)-lire l’interview d’Olivier au départ fictif à Grenoble
#1 Passer le cap
#2 Fuir les moustiques

La Suède subit un record de chaleur cette année, comment gères-tu cette canicule ?

Par rapport à ce qu’on a chez nous, ce n’est pas non plus dingue, mais je ne m’attendais pas à trouver ça ici. J’ai l’impression qu’il fait plus chaud que la semaine dernière. Après, c’est peut-être l’accumulation de chaleur, qui fait que j’en ai un peu marre. Il fait des journées à 30 degrés à l’ombre. Ça fait une bonne semaine que ça dure. Je le ressens quand je suis sur le vélo. Je suis moins efficace, j’ai plus de mal à appuyer sur les pédales, à faire bouger les jambes, justement parce qu’il fait chaud. Il faut que je boive souvent.

L’eau dans les bidons est chaude aussi. Ce n’est pas évident de trouver de l’eau fraîche dans la journée. Je suis revenu sur un rythme un peu plus tranquille, en particulier pour la chaleur, mais aussi parce que j’avais envie de prendre plus le temps. J’ai moins de contraintes que sur les premières étapes où il fallait que je roule beaucoup. Je n’ai pas besoin de me presser.

Question transmise à L’avertY : 
Lors d’un bivouac, est-ce que tu n’as pas peur de dormir tout seul dans un endroit que tu ne connais pas ?

Jusqu’à maintenant, non. Là, ce qui me fait un petit peur, c’est le fait qu’il y ait des feux de forêt. Je n’ai pas trop envie d’être réveillé en pleine nuit par la forêt qui crame autour de moi. Ça me démotive un peu à aller chercher des coins dans la forêt. Pour l’instant en tout cas. Même si, en bord de mer, ça va. J’ai vu qu’il y avait des feux de forêt un peu partout en Suède, et même dans le Nord. Vraiment de partout. Ça m’a calmé là-dessus. Juste pour cette raison-là. Le fait de dormir tout seul, de dormir isolé, ça ne me gêne pas du tout. Au contraire, ça me fait du bien d’être dans un endroit au calme, au bord d’une rivière, sans le bruit des voisins du camping.

Mercredi 18 juillet, tu as été hébergé par un Suédois à Umeå (84 000 habitants). Comment s’est passé cette rencontre ?

Le site “Warmshowers” met en relation des cyclistes, entre ceux qui proposent un hébergement chez eux, et ceux qui sont en vadrouille, qui cherchent de quoi passer la nuit dans les pays qu’ils visitent. C’est le même principe que le couchsurfing, mais dédié aux cyclistes, avec l’idée de rencontrer des gens qui ont les mêmes centres d’intérêt que nous. Les gens proposent soit un canapé, soit un lit, soit une place pour planter la tente. J’en avais entendu parlé, donc je me suis dit que j’allais expérimenter. J’arrivais dans une ville assez importante. Les campings étaient plutôt à l’extérieur de la ville, ça faisait pleins de détours, c’était pas forcément très pratique. Je me suis dit que c’était l’occasion de voir quelqu’un qui habite sur place et de changer de mode d’hébergement. D’être un peu plus en ville.

J’ai contacté John-John (prononcé “Yon-yon”) deux jours avant d’arriver. On s’est mis d’accord pour se retrouver le soir dans la ville. Il m’a accueilli chez lui. Il est Suédois, originaire de la banlieue de Stockholm, et il est venu dans cette ville pour faire ses études. Il est en train de finir son master en informatique et doit avoir 23 ou 24 ans. Il avait un petit appart d’étudiant, avec la place pour mettre un matelas gonflable. Il m’a offert le repas. On a mangé ensemble. On a pas mal discuté de nos voyages à vélo. Lui, il avait fait Stockholm-Rome. Ça correspond plus ou moins à ce que je veux faire. Même s’il n’a pas pris exactement l’itinéraire par où je veux passer. On a pas mal de points communs sur lesquels on a pu échanger. C’était bien sympa de passer une soirée avec lui. On est resté tranquillement chez lui. De toute façon, moi, après des journées de vélo, je ne suis pas vraiment en grande, grande forme. On n’a pas fait des folies.

Le principe du site est de pouvoir accueillir quand les cyclistes reviennent chez eux. C’est vraiment cool. Lui, en particulier, a accueilli avec grand plaisir. C’est marrant, ça fait plusieurs années qu’il était inscrit sur ce site. Il avait jamais eu de demandes. Et là, il a eu trois personnes en deux semaines qui sont passées chez lui. Les autres été, il n’était pas là. Les cyclistes qui passent en Suède, je pense que c’est plutôt l’été.

J’avais redemandé à une personne pour ce soir (ndlr : 20 juillet). Elle ne m’a pas répondu. Je pense qu’il y a un certain nombre de gens qui sont en vacances. En septembre, octobre quand je serais peut-être plus sur la fin du séjour, ce sera peut-être plus facile de contacter des gens. J’ai bien l’intention d’essayer de reproduire l’expérience, et après à mon tour d’accueillir des gens chez moi si l’occasion se présente. Dans les campings, il n’y a pas beaucoup de Suédois. C’est l’occasion de rencontrer des gens qui vivent sur place.

Chaque semaine, L’avertY propose à Olivier de commenter certaines de ses photos prises durant le trajet. Quel est le contexte de la photo ? Quelles anecdotes ? Pourquoi ces choix-là de photos ?

N°8 Ville-église, ville fantôme

« J’ai visité cette ville-église emblématique à Gammelstad, patrimoine de l’UNESCO, qui est préservée. Les gens viennent là pour les fêtes religieuses, pour les célébrations le dimanche. Mais ils n’ont pas le droit d’y vivre. C’est juste pour passer la nuit. C’est très sommaire. Tu as un lit, une table, une chaise. Et c’est un peu près tout. J’ai fait une visite guidé. En temps normal, c’est vide, complètement mort. Quand il y a des occasions, les gens sont contents de se retrouver, avec les voisins. »

N°9 Soleil rasant sur bras de mer

« L’avantage avec la mer baltique, c’est que je peux me baigner. Je peux facilement accéder à la mer, me rafraîchir. Je l’ai fait hier, il y a deux jours. C’est sûr que ça fait du bien après une bonne journée de vélo en plein soleil de pouvoir se tremper un petit coup. Faire redescendre la température comme ça. »

N°10 Piste de ski convertible

« C’était un gros camping, il y avait beaucoup de caravanes. Vraiment un truc énorme. Il y avait six bâtiments. En arrivant, j’étais surpris de voir qu’il était installé sur les pistes de ski. Il y a les remontées mécaniques à gauche, les bosses juste au-dessus. Là où sont les caravanes, c’est la piste de ski. C’était rigolo, et en même temps, le haut de la colline, il est à 140 m d’altitude. Quasiment au bord de la mer, et il y a quand même une station de ski pour l’hiver. Pour un Grenoblois, c’est assez surprenant. Il doit y avoir deux pistes avec des bosses un peu artificielles, histoire de rajouter du piment à la chose. »

Photos bonus : Le musée ouvert de Gammelstad a reconstitué des habitations traditionnelles du XVIIIe (18e), au début du XXe (20e) siècle.

« Passer la barre des 1000 km, ça marque un peu. Je remarque que je progresse. Au jour le jour, je fais quelques dizaines de kilomètres. Sur la durée du trajet, ça ne paraît pas énorme. Mais en cumulé quand je calcule combien j’ai fait depuis le départ, c’est là que je me rends compte que, mine de rien, j’avance. Que je progresse dans mon périple. Ça fait plaisir. Il reste encore de la route. Je vois que jusqu’à maintenant tout s’est bien passé. Je me sens bien, je peux aller jusqu’au bout en gardant ce rythme-là. »

Encouragez Olivier à parcourir les 5500 km restants en envoyant des questions, commentaires, mots sympas à ludovic.chataing@laverty.fr. Rejoignez le salon de discussions Discord. D’autres photos disponibles sur son blog.

Propos recueillis et mise en page par Ludovic Chataing
Photos Olivier Letz.

#2 « Trouver des coins nature, c’est ce que j’étais venu chercher. »

L’odyssée d’Olivier : fuir les moustiques

Ce 12 juillet, Olivier a déjà changé de pays deux fois. Au revoir la Norvège, un coucou express à la Finlande, et bonjour la Suède. La descente vers le Sud s’enchaîne, jour après jour, à toute allure. En avalant 347 km pour ses trois premiers jours en Suède (dont une grosse étape de 142 km), il est largement au-dessus de sa moyenne théorique de 70 km par jour. Si désormais le temps est au beau fixe, il faut compter sur la présence massive… de moustiques !

#0 (Re)-lire l’interview d’Olivier au départ fictif à Grenoble
#1 Passer le cap

As-tu noté des changements en traversant les frontières ?

Je me faisais la remarque : il n’y a pas de différences fondamentales en passant d’une frontière à l’autre. Les deux frontières que j’ai passées (ndlr : Norvège-Finlande, Finlande-Suède), c’était à 100 km d’intervalle. La végétation, la population ne sont pas trop différentes. Je vois un peu plus des lieux de vies, du monde dans les villages, des gens devant leur maison à tondre la pelouse, ou à faire des petits travaux dans le jardin. Chose que je n’avais pas vue jusqu’à maintenant. Je commence à retrouver la civilisation. Depuis trois, quatre jours, il fait grand beau temps. Aujourd’hui, j’ai eu un grand ciel bleu toute la journée. Limite, je crame. C’est impressionnant la différence entre les jours où j’étais sous la grisaille où il faisait timidement 10 degrés. Et là, il fait plus de 25 degrés, voir 30 degrés.

Sur les derniers jours, l’itinéraire prenait des grandes routes en forêt. Dans cette région, il y a beaucoup de moustiques et autres bestioles volantes qui piquent. Tu as tout le temps une nuée de bestioles autour de toi quand tu es au camping, ou quand tu fais une pause. Pour toutes ses raisons, j’ai beaucoup roulé. Je n’avais pas trop envie de m’attarder, ce n’était pas très accueillant. Depuis hier, j’ai quitté la grande route. Je passe dans des routes de campagne, des chemins, des itinéraires plus adaptés au vélo. C’est plus agréable.

Tu as battu ton record d’étape : 142 km ! Comment ça s’est passé ?

Je n’avais pas envie de m’arrêter n’importe où. Je préfère aller au camping dans ces conditions-là. Soit je coupais les 142 km en deux, avec une nuit que j’imaginais un peu difficile entre les deux, soit je traçais directement à la prochaine étape. Étant donné que j’avais fait une première journée de 130 km, ça passait. J’ai poussé jusqu’à 140 km pour voir ce que ça donnait. C’était un peu difficile sur la fin. Je n’avais plus vraiment d’énergie dans les jambes. J’essayais d’avancer tout doucement, sans forcer. J’étais parti le matin tôt à 8h, donc j’avais de la marge. J’ai fini en roulant un peu pépère. Je fais du 15 km/h en roulant normalement, là, j’étais à 10 km/h. Je suis arrivé à 17h30. Le soir, je voulais manger au restaurant, mais il était fermé.

Est-ce que tu croises des gens qui jouent au football ?

Non, je n’en ai pas vu spécialement. Mais quand je dis que je suis Français, ils font référence à la coupe du monde. C’est assez rigolo. On me dit : “Ah les Français, ils vont gagner”. J’ai vu des bouts de match sur mon téléphone. Sinon, je regarde les résultats le lendemain. Je n‘ai pas eu l’occasion d’aller dans des bars. Pour la finale, je vais essayer de trouver un endroit (ndlr : Olivier a finalement regardé le match au camping).

Chaque semaine, L’avertY propose à Olivier de commenter certaines de ses photos prises durant le trajet. Quel est le contexte de la photo ? Quelles anecdotes ? Pourquoi ces choix-là de photos ?

N°5 Soirée lavvu (tipi)

« Il y avait une dizaine de personnes au camping, on a passé une soirée sous un grand tipi, l’habitation traditionnelle des Lapons, sur proposition de la gérante. Elle a fait un feu. La fumée montait et sortait par le haut. Il y avait une petite bouilloire pour faire du café et des bancs avec des peaux de renne pour s’asseoir. C’est vraiment sympa de discuter avec les gens qui sont dans le camping, parce que sinon chacun reste dans son coin. On se croise, on se dit bonjour, mais on n’a pas l’occasion d’échanger. Il y avait un couple d’Allemand (à droite sur la photo) qui faisait du vélo aussi. Sur la portion de route dont on a parlé, ils faisaient exactement l’itinéraire inverse de ce que je faisais. Je leur ai parlé des deux, trois étapes par où je venais de passer, et inversement. Ce sont eux qui m’ont parlé des moustiques, des taons ou autres mouches que j’allais rencontrer par la suite. »

N°6 Le bivouac idéal

« Je suis tombé là-dessus complètement par hasard en quittant la route. Il devait être 16h30, 17h. J’étais en train de me dire que j’allais chercher un coin pour dormir, que comme il faisait beau, avec une rivière pas loin, je devrais trouver un coin sympa sans besoin d’aller au camping. J’ai vu un panneau qui indiquait des ruines. Je vais voir. En arrivant aux ruines, ce n’était pas très intéressant, il y avait trois petites pierres les unes à côtés des autres. Mais il y avait cet espace aménagé : abris, banc, table. De quoi faire du feu. Une zone d’herbe. La rivière qui coule juste derrière. Vraiment idéal pour me doucher, manger tranquillement. J’ai posé ma tente juste là, j’étais un peu isolé. C’était la première soirée où j’étais en camping sauvage. La première fois aussi que je faisais du feu, plus pour l’ambiance et pour éloigner les bestioles. J’ai quand même pris mon petit réchaud à gaz pour me faire à manger. Trouver des coins nature, c’était un peu ce que j’étais venu chercher ici. »

N°7 Des couronnes suédoises

« En Finlande, ils ont l’Euro, mais pas en Norvège ou Suède. En Suède (ndlr : membre de l’Union européenne depuis 1995), ils ont encore la couronne suédoise. J’essaye de retirer des sommes conséquentes pour avoir moins de frais. Ensuite, je fais tous mes achats avec la monnaie, plutôt que par carte. Alors que quand c’est en Euro, il n’y a aucuns frais, que ça soit par carte ou en retirant au distributeur. Tu te poses moins de questions. Il y avait un décalage horaire d’une heure aussi en Finlande. Sur une journée, ça ne m’a pas trop perturbé. En revenant en Suède, on revient à l’heure d’Europe de l’Ouest. Je n’avais pas du tout fait gaffe, c’est quand j’ai allumé mon téléphone, que lui avait changé d’heure automatiquement, alors que ma montre non. Au début, je ne comprenais pas pourquoi. »

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Propos recueillis et mise en page par Ludovic Chataing
Photos Olivier Letz.