Monica a d’abord réagi au tweet d’appel à témoignages concernant le confinement contre le coronavirus. Relancée par L’avertY, elle a ensuite raconté sa nouvelle journée type de travail auprès d’une personne âgée, “chez qui j’interviens 21 h par semaine, soit trois jours”.
Mercredi, je pars en voiture de SMH [Saint-Martin-d’Hères] pour Grenoble, près de la gare. D’habitude, je fais le trajet en vélo mais le stationnement étant gratuit, merci M. Piolle, j’en profite. D’autant plus que le peu de véhicules n’empêche pas les accidents. Témoin, ma collègue qui, rentrant en vélo du travail, s’est faite renversée par une voiture en tort. 45 jours de “repos” forcé chez elle et trois fractures du bassin.
Bref, je dilue la béchamel pour éviter de penser au pire. Celui-ci étant de refiler mes microbes et autres virus potentiels à la personne chez qui je vais. Je prends le relai à 10 h d’une collègue. Là , je me lave les mains, enfile un masque chirurgical. Ma toubib m’en a donné deux après que je lui ai expliqué mon métier et surtout ma crainte de faire passer le virus à la personne âgée (85 ans) et à risque (problème de poumons). Au passage, elle m’a expliqué que les gants n’étaient pas utiles, le masque si. Mais j’ai eu en prime, la “recette” pour conserver ces masques : alterner journellement les deux masques et les passer au sèche-cheveux très chaud au retour du travail. La chaleur extrême détruirait le virus*. Mais aucun masque à la vente en pharmacie pour nous les aides à domicile.
Donc, de 10 h à 17 h 30, je vais rester avec la dame auprès de qui je travaille. Je vais alterner les occupations très courtes (la dame a une maladie neurodégénérative) : préparer le repas, ranger, noter, parler, servir le repas, accompagner aux toilettes, regarder les infos à la télé, rester à côté d’elle sur le canapé mis en position allongé, faire la lecture, chanter, faire lire. Les jeux sont devenus trop compliqués… Prendre le goûter, faire boire, et expliquer une fois l’heure venue, que je dois partir. Non, je ne l’abandonne pas !
Faire rire, dédramatiser, dire des bêtises, faire des grimaces, etc. Tout cela pour que la dame ne se rende compte de rien. Sortir aussi, un peu, quelques minutes dans le square, tout en ayant au préalable fait mettre les gants, l’écharpe pour le vent, pris les lunettes de soleil, mis la crème sur le visage, pulvérisé les gouttes pour nettoyer le nez, fait prendre ses gouttes homéopathiques. En ai-je oublié ? Et puis surtout être vigilante pour deux, pour que ce fichu virus ne nous touche pas !
En fin de semaine, courses pour ma maman, 88 ans. Le lendemain, samedi, courses pour moi, attente dans la file dehors. Épuisée… Dimanche, repas avec ma mother, vite fait, puis retour chez moi. J’ai l’impression d’avoir dormi tout le week-end.
Car j’ignore si je suis porteuse ou pas du virus. Pas de dépistage à mon niveau. Très peu de dépistages à Grenoble, 70 par jour ?
La semaine dernière j’ai été en mode stress permanent. Du coup, épuisement, respiration saccadée, hypoglycémies, stress…
Cette semaine 2 du confinement, je me sens mieux. Ma toubib m’a rassurée. Je repars, plus sereine. Je me demande qui je pourrais aider autour de moi.
Voilà mon ressenti et mon expérience. Je suis accompagnante éducative et sociale et travaille auprès de personnes âgées depuis plus de 10 ans.
Monica
* Lire ces articles sur la réutilisation de masques :
– Masques en tissu : qui peut s’en servir ? (Ça m’intĂ©resse)
– Peut-on rĂ©utiliser un masque si on le fait chauffer suffisamment ? (MĂ©diacitĂ©s)
Les autres contributions sur le confinement :
📣 « Si l’enfer c’est l’époque vous n’êtes que Pluton et non Jupiter »
📣 « En cinq jours les enfants ne sont sortis qu’une fois »
📣 « C’est peut-être comme ça que se met en place un système totalitaire »
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