Ici, place Saint-Bruno

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Le clocher de l’église Saint-Bruno et un bout de son marché.

Place Saint-Bruno il y a…

  • Un marché qui se tient tous les jours jusqu’à 13h, sauf le lundi.
  • Une dragonne de bois et de métal qui semble être sans cesse prise d’assaut par une dizaine de bambins.
  • Un clocher qui sonne de nouveau l’heure.
  • Neuf cafés, dont un avec un distributeur de Caransac et un autre, aujourd’hui fermé, où se sont tenues certains jeudis soirs d’irréelles lectures de poésie en langues étrangères.
  • Une petite rue adjacente à la place qui porte le joli nom de « Rue de la nursery ».
  • Des règlements de compte, auxquels on me fait tantôt référence en parlant du Mexique, tantôt en les qualifiant de « petites embrouilles, mais citez-moi un endroit où il n’y en a pas, hein ? ».
  • Des jeunes qui me demandent régulièrement des feuilles à rouler quand je passe à leur hauteur.
  • Des odeurs de sardines grillées à l’heure du déjeuner.
  • Une grande étendue de bitume qui accueille les stands du marché, les camions blancs des vendeurs, puis des voitures et des tables en plastique où la chaleur infernale que dégage le sol au plus chaud du mois de juillet ne parvient pas à dissuader certains d’y boire un thé ou un café en plein après-midi.
  • Plein de langues que l’on chuchote, que l’on crie, que l’on mélange allègrement.
  • Une « salle des tickets » qui tient son nom des tickets de rationnement que l’on y distribuait aux habitant·e·s de 1940 à 1952 (aujourd’hui siège de l’Union de Quartier).
  • Un Club de retraités.
  • Des hommes, beaucoup d’hommes, jeunes et vieux. Certains en groupe, attablés autour d’un café ou à demi assis sur le capot d’une voiture, fumant tranquillement une cigarette. D’autres assis seuls sur l’un des nombreux bancs de la place.

Au marché, sur la terrasse du Capri

Aujourd’hui le temps est frais, il est encore tôt et, comme c’est le cas six jours sur sept, c’est le marché. Assise à la terrasse du Capri, je croque un morceau de l’église Saint-Bruno ainsi que quelques barnums colorés.

Une dame et une fillette s’installent à la table d’à côté, non sans s’être assurées que ça ne me dérangeait pas. Marie-Laure est venue avec Senda, sa petite-fille, sa « loupiote » comme elle l’appelle joliment. Elle habite à deux pas, derrière la gare, et vient souvent au marché car « c’est pas cher ». Quant au Capri, c’est toujours là qu’elle s’assoit : « on risque déjà d’attraper des choses avec le Covid, alors je ne vais pas en plus aller m’asseoir sur des tables pas propres. Ici c’est bien ! T’es sûre que tu veux rien d’autre ma loupiote ? ».

Marie-Laure à gauche, et à droite Senda, sa petite-fille surnommée sa « loupiote ».

Senda est chez sa mamie depuis quelques jours et en vacances depuis la veille. Elle rentre en 6e en septembre. Elle vient d’acheter des « pop it » au marché, des jeux en silicone multicolores qu’elle collectionne (« Avec ceux que j’ai acheté aujourd’hui, j’en aurai 14 ! Mais c’est pas comme une fille sur Internet, qui en a 270 ! ») et pour lesquels elle avait économisé son argent de poche.

« Tiens ma loupiote, tu irais voir à côté s’il a des escalopes ? Tu reviens me dire après ? Merci ma loupiote ! » — Marie-Laure à sa petite-fille.

Avant de partir, Senda me laisse son numéro de téléphone pour que je lui envoie son portrait et celui de sa grand-mère. Elle me répondra par SMS : « merci beaucoup c’est très jolie [sic] j’espère qu’on se reverra ».


Encore au marché, sur les marches de l’église Saint-Bruno

Aujourd’hui il fait chaud. C’est le milieu de la matinée et le marché bat son plein. Je suis assise sur les marches de l’église et je peins les robes colorées de Houri et Ahmed. Mes yeux ne sont pas les seuls que leurs couleurs chatoyantes ont attirés : à côté de moi sont assises deux fillettes, parées de robes et de voiles multicolores. Je comprends qu’elles attendent leur papa et leur grand frère qui font le marché. Au fur et à mesure que les robes font leur apparition sous mon pinceau, la plus jeune m’égrène leurs couleurs : jaune, noir, rouge, vert. Elle est curieuse et même si elle ne connaît que quelques mots de français, nous échangeons nos prénoms (elle s’appelle Safa et sa sœur Marwa), nos pays (elles sont Pachtounes et viennent d’Afghanistan) et nous parlons de bébé (Safa me dit que sa maman est à la maison avec une toute petite sœur, elle me demande si j’ai déjà des enfants). Elle m’épèle son prénom avant de partir retrouver son père.

Les robes du stand d’Houri et Ahmed sur le marché de la place.

Houri, le patron du stand de robes, m’interpelle : « C’est bon, t’as fini ? ». Il est pressé, court entre les portants de vêtements, distribue un sac à untel tout en rendant la monnaie à l’autre. Ahmed, lui, est souriant sous son bob. Il me raconte qu’il vend des robes avec Houri depuis 6 mois, tous les jours entre 6h et 13h sauf le lundi, oui oui.


Toujours au marché, les yeux fermés

Aujourd’hui la fin du mois de juillet est proche, la chaleur est étouffante et j’ai les yeux fermés. C’est la fin du marché. Je suis guidée par Samson, qui propose avec d’autres personnes de son collectif artistique des « balades sonores » pendant le marché.

Avec les yeux fermés, le marché prend une autre dimension.

Côté odeurs, il y a l’essence des moteurs de camions que l’on démarre, la viande grillée, les sardines, les fleurs (que j’imagine être celles de Chauffin, au n°5), l’urine (dans une ruelle adjacente, je ne sais pas bien laquelle).

Côté bruits… Les « bips bips » de la caisse (probablement du Zeeman, au n°3). Les bruits de métal qui cogne contre du métal. Les pieds de parasol que l’on traîne lourdement sur le sol. Les moteurs qui s’allument. Des doigts qui tapotent en rythme sur une caisse. Une personne qui chante (en vrai ou à la radio ? Je n’ai pas réussi à me décider). Le roucoulement des pigeons. Le silence, quelque part, qui tranche avec les éclats et les bruissements incessants du reste de la place. Le « smack » sonore de deux personnes qui se font la bise. Des vélos qui passent en couinant, qui passent en freinant, qui passent en faisant résonner leur sonnette. Les « vrrrmmm » mats des trottinettes électriques. Des gammes au piano, par une fenêtre. Un bruit d’eau, comme une fontaine qui coulerait. Les cloches de l’église qui sonnent probablement 12h30. Plein de mots en plein de langues, quelques phrases que j’intercepte tout de même :

« Tu vas acheter une débroussailleuse ? »

« Aïd Moubarak ! »

« Allez c’est seulement 1€, 1€ ! »

« Hé ragazza ! »


Sur un banc, entre la Dragonne et « Les Galettes de Nassira »

Aujourd’hui c’est bientôt l’heure du déjeuner et il y a du monde autour de la Dragonne : plein d’enfants, sur le jeu, et au moins autant de vieux messieurs seuls, assis sur les bancs du parc, qui lisent le journal ou fument une cigarette (parfois les deux en même temps). Certains ne font rien du tout. C’est le cas de Moungi.

Moungi vient souvent sur la place alors qu’il habite vers Grand’Place.

Moungi vient place Saint-Bruno pour :

  • Faire des courses au marché (il achète des pêches et des pommes).
  • Acheter parfois de la viande chez Boudoudou.
  • Boire de temps en temps un café au Real Bar, chez Moktar qui est Tunisien comme lui.

Mais le plus souvent il s’assoit sur un banc et il attend.

Pour venir place Saint-Bruno mener ces menues activités, j’ai pensé que Moungi habitait le quartier, mais non : il vient de Grand’Place, de l’autre côté de la ligne de tram A. Oui c’est sûr : « c’est un peu loin. Mais c’est comme ça. C’est calme ici ». Et « mélangé » aussi, ajoute-t-il un peu plus tard.

Moungi vient de « Djerba la douce ». Après trente-cinq années passées à Paris dans la restauration (le couscous de Bastille où il a travaillé existerait toujours, bien qu’il ne soit pas allé vérifier), il est arrivé à Grenoble. C’était il y a vingt ans. Toute sa famille est au bled, alors Moungi est seul.


La Dragonne, jeu pour enfants dans le parc de la place.

À l’ombre des arbres, près de la Dragonne, mais sur un autre banc

Aujourd’hui une dame est assise non loin de moi. Elle a entre ses pieds un sac en plastique Casino et des yeux bleus magnifiques qu’elle tient de son père. Elle s’appelle Amel.

Amel garde depuis une vingtaine d’années les enfants des autres. Ils sont cinq aujourd’hui, à escalader le dos de la Dragonne — le sixième est resté à la maison réviser sa guitare et commencer son cahier de vacances. La place, elle y vient souvent : les enfants aiment bien, et puis ça change du parc qui se trouve près de la gare où elle se rendait avant, avec d’autres nounous, mais où il y a eu « plein de problèmes ». Elle m’énumère tous les parcs de Grenoble avant de conclure que depuis deux ou trois ans que ce grand jeu en bois a élu domicile place Saint-Bruno [ndlr : inauguré en fait en 2017], c’est là qu’elle vient le plus.

De la place, Amel aime la Dragonne, entourée d’arbres sous lesquels elle peut prendre l’ombre pendant que les enfants jouent, et la bibliothèque où elle va régulièrement avec eux (« d’ailleurs il faut que je passe voir leurs horaires d’été »). Mais elle n’aime pas le marché où elle ne trouve jamais « rien de terrible » ni les toilettes de la place « qui sont très sales et où une fois [elle s’est] retrouvée coincée avec un petit ».

Pendant que nous discutons, Amel tire de son sac de courses de petits morceaux de pain qu’elle grignote distraitement. Elle me parle de la place Saint-Bruno mais aussi des moments où « l’été, Grenoble, c’est trop ». Depuis quelques années alors, elle s’échappe une semaine à Marseille pour voir la mer. Elle loue une chambre sur le Vieux Port à chaque fois, parce que « Marseille c’est grand, mais la route entre la gare et le Vieux Port c’est facile : elle descend tout du long ».


Peut-être sur le même banc, mais un autre jour

Aujourd’hui c’est l’après-midi et il fait très chaud. Le bar « Le Saint-Bruno » est passé en horaires d’été. Un petit garçon torse nu fait des tours sur un mini quad, autour de la Dragonne. À chaque drift, il soulève devant les bancs un nuage de sable et des odeurs d’essence. Un homme, que je soupçonne être son père, l’apostrophe de temps en temps : « Eh doucement Dylan hein ! ». Les mamans du parc trouvent que Dylan ne va malgré tout pas assez doucement et elles courent attraper leurs bambins dès qu’ils s’approchent un peu trop de la piste ensablée sur laquelle Dylan et son quad passent à toute allure.

« 67 000 ». 
Je me retourne : un jeune type debout derrière moi désigne la Dragonne d’un signe de tête.
Pardon ?
67 000 € que ça a coûté ce jeu. Franchement, vous croyez pas que ça aurait été mieux de donner l’argent aux pauvres ? Allez, au revoir madame !


La façade « Galette chez Nassira »

Sur un banc, face aux « galettes de Nassira »

Aujourd’hui c’est l’heure du déjeuner et je peins la devanture des « galettes de Nassira ». On me dit que Nassira, c’est la dame la plus âgée qui confectionne les galettes, à l’intérieur. Il y a une autre femme, plus jeune, et un jeune homme aussi, qui a vu que je peignais la boutique et qui me lance de temps à autre de petits sourires amicaux.

Alors que je range mon matériel, j’entends un cri : « Majesté : attention ! ». Surprise, je tourne la tête pour découvrir un petit garçon haut comme trois pommes qui vient de tomber par terre. « Attends Majesté, j’arrive » dit son papa, qui me dépasse en courant pour l’aider à se relever.


Dans « La Maison de Saint-Ibrahim »

Aujourd’hui je pousse la porte d’un lieu de la place qui m’est connu : La Maison de Saint-Ibrahim, un petit restaurant tenu par celui que j’ai toujours appelé « Momo ». On y mange du couscous et de la chakchouka dans un décor chatoyant.

Le restaurant se trouvait d’abord de l’autre côté de la place, tout près du Capri. Mais il y avait du trafic, de cigarettes et d’autres choses aussi, « de la délinquance » me résume sobrement Momo. Alors il a déménagé à deux cents mètres de là, près de l’église : « au calme ».

Pourquoi la place ? « Je ne sais pas. Comme ça ». Il réfléchit. « En fait si, je sais : parce qu’il y a des gens de partout, plein de cultures. C’était facile de s’installer ». Le nom du restaurant est un clin d’œil à la place et à son pays, l’Algérie :

« Ibrahim, c’est Bruno en arabe. Et Sidi Brahim, c’est une ville à la frontière avec la Tunisie. Alors voilà : ici c’est La Maison de Saint-Ibrahim sur la place Saint-Bruno ». — Momo, gérant du restaurant.

Chez Momo, « La Maison de Saint-Ibrahim ».

De ce lieu, j’aime les tentures écarlates et les petites tables en bois, mais ce que je préfère je crois, c’est l’écriteau accroché en vitrine qui dit : « L’amour ça se cuisine tous les jours ».


En terrasse, autour d’un thé à la menthe

Aujourd’hui je rentre du marché quand je me fais arrêter par Walid, la quarantaine, cheveux ramassés en queue de cheval : « Alors, tu l’as fini ton dessin ? ». Je lui montre mes planches, il rigole de découvrir la place sous mes pinceaux : « ah tu t’acharnes sur Saint-Bruno en fait ! ».

Nous nous retrouvons dans l’après-midi au numéro 2 de la place, autour d’une table en plastique qui chauffe entre le bitume et le soleil. Avant d’aller commander il m’avertit : « Attention, le thé ici c’est pas comme vous, en sachet tout ça : c’est un thé maghrébin quoi, t’es sûre que ça va ? ».

Walid est arrivé à Grenoble il y a une vingtaine d’années, il connaît le quartier depuis à peu près autant de temps et il me brosse en quelques phrases une histoire cosmopolite de la place où se sont succédés les Juifs, les Corses, les Italiens, les Roumains, les Gitans, les Arabes — peut-être pas dans cet ordre là.

Il me dit aussi, en attendant que nos thés à la menthe refroidissent, que « Saint-Bruno ça craint. Ça a commencé il y a 6–7 ans. Il y a des tirs dans le quartier. Quelqu’un qui buvait son thé, tranquille ici, s’est pris une bastos dans la jambe. C’est des histoires de vengeances. Il y a la mafia sur la place, du trafic de drogue. On est au Mexique ici ! ».

Walid boit le thé à la terrasse du numéro 2 de la place.

Walid me parle des tensions sur la place, des terrasses qui ne se mélangent pas. En sous-texte il y a le racisme. L’homophobie aussi.

Je lui demande s’il passe du temps place Saint-Bruno et il se marre : « Malheureusement… ou heureusement : oui ! ». En témoignent toutes les poignées de main qu’il échange avec des types qui passent à côté de notre table. Le centre-ville, il ne s’y sent pas très bien : rien de méchant me dit-il, pas d’insulte, mais des regards parfois pesants qui finissent par dissuader d’aller voir ailleurs. « Et puis le thé, ici il coûte 1€, c’est pas pareil là-bas hein ! ».


Au Club Saint-Bruno

Aujourd’hui j’attends quelqu’un au numéro 20 de la place.

Depuis des années, des retraités se réunissent au Club Saint-Bruno. Le lundi, c’est chorale, le mardi c’est gym (le matin) et jeux de société (l’après-midi) et le vendredi, c’est jeux de société aussi. Un samedi par mois il y a un loto, en janvier c’est la galette, quand il fait beau c’est tournoi de boules (« mais amical hein, familial : on n’est pas là pour la compétition ») et l’été, des séjours à l’étranger sont organisés, en Espagne ou en Italie.

C’est Joaquim qui m’explique tout ça. Il a rejoint l’association il y a une dizaine d’années et s’implique beaucoup dans l’animation depuis l’année dernière, l’actuel président « faisant de l’âge ». Toutes ces activités bien sûr, c’était « avant le covid ». Le Club a été fermé de mars 2020 au 30 juin 2021.

« Ça a fait un grand vide pour les adhérents. J’en ai croisé beaucoup sur la place, depuis la fermeture qui me disaient “Jo, c’est quand que ça ouvre ? On est déprimés tous seuls chez nous”. Ça fait mal au cœur. » Joaquim, adhérent du Club Saint-Bruno.

La façade du Club Saint Bruno au numéro 20 de la place.

Quand ils ont pu rouvrir le Club, début juillet, Joaquim et d’autres membres ont organisé un repas. Ils ont appelé tous les adhérents un par un, les 70, pour les prévenir. « Ils étaient aux anges. Sauf certains qui n’ont pas pu venir parce qu’ils étaient en vacances, ou pas voulu venir parce qu’ils étaient trop déprimés ».

Il y a dans le bâtiment une grande salle à manger avec des tables recouvertes de toile cirée aux motifs champêtres, une bibliothèque partagée, les trophées des tournois de boules de ces dernières années, un piano (« pour la chorale ») et une seconde salle tout en parquet dans laquelle j’imagine des couples d’octogénaires valser.

« Dans cette salle, on est joyeux » conclue Joaquim.

Joaquim est arrivé du Portugal à quinze ans (« et demi » précise-t-il) et il habite depuis 1983 dans le bâtiment jaune-vert du 9B place Saint-Bruno. Depuis son arrivée sur la place à 23 ans, il n’a changé ni d’immeuble, ni de montée, ni de palier mais simplement d’appartement en passant du F2 au F3.

Quand il a emménagé dans sa montée, il n’y avait « que des vieux ». Maintenant c’est sans doute lui le plus vieux et pour le reste, ce sont beaucoup de locataires, des étudiants. « C’est bien ». Dans sa montée, il y a aussi eu durant de nombreuses années la sirène qui retentissait chaque premier mercredi du mois : « ça faisait un boucan d’enfer ». Depuis que des travaux ont été faits dans le clocher de l’église Saint-Bruno (dont les cloches ne sonnaient déjà plus depuis un moment), la sirène y a aussi été déplacée.

La nappe à carreaux du Club Saint-Bruno.

Comme tous les gens que j’ai rencontrés, Joaquim me dit que « la place a beaucoup changé. Beaucoup changé ».

Il me parle du marché, qui était « phénoménal : c’était le grand marché pour les habits, à Grenoble. On allait place aux Herbes pour les fruits et légumes et à Saint-Bruno pour les vêtements. C’était… comment vous dire ? C’était comme la foire de Beaucroissant ! ».

Il me cite les bijoutiers qui ont disparu, les magasins de télé et de vêtements qui sont devenus des cafés ou des snacks. Me raconte les lieux de la place où il a ses habitudes :

  • Le club Saint-Bruno (bien sûr).
  • Les bars où il est successivement allé avec un ami : le Capri au départ, puis « un autre bar là, qui était tenu par un ancien coureur cycliste — ah j’ai oublié son nom à lui… », puis aujourd’hui le Saint-Bruno.
  • La boucherie Boudoudou.

« Ce que j’aime place Saint-Bruno, comment dire… C’est que c’est ouvert sur tout : il y a le tramway, on peut aller partout. Et puis je trouve que c’est calme. Bon, il y a eu des petites embrouilles il y a deux ou trois ans mais où est-ce qu’il n’y en a pas, hein ? ». Joaquim, habitant du 9B.

Quand je lui demande s’il imagine rester encore longtemps sur la place, il me répond sur le ton de l’évidence : « Oh oui, bien sûr ». Il attend un peu et ajoute : « Même si je trouve qu’il y a de moins en moins de respect chez les gens. Mon rêve, ce serait d’être sur une île, tranquille, sans personne. Avec le bruit des arbres, le vent dans les feuilles. La nuit, on entendrait le bruit des branches qui craquent et on dirait que c’est une personne qui marche dans le jardin, mais non : ce serait juste le bruit de la nature ».

Je lui dis, avec un clin d’œil, que sur la place Saint-Bruno aussi, en tendant bien l’oreille, on peut entendre les oiseaux et le vent dans les branches des platanes. Il me sourit.

Alice Quistrebert, carnettiste-illustratrice.

La biographie d’Alice est disponible sur son site.

Pour aller plus loin…
« Redécouvrir la place Saint-Bruno », Maël Trémaudan.
« Raconte-moi Berriat Saint-Bruno », Association Histoires de…

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Définition Carensac — Confiserie-foraine.com
Pop It : le jeu phénomène de l’été— LCI
Collectif artistique « Ici-Même »— Site de l’association
Recette de Chakchouka — Cuisine.journaldesfemmes.fr
Définition Bastos — Le Robert en ligne

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